Vivre le Carême
Devant nous, quarante jours pour revenir à nous-mêmes, à un peu de bon sens ; quarante jours pour revenir aux autres, aller à leur rencontre ; quarante jours pour revenir à Dieu ou le laisser rétablir en nous une juste image de lui. Quarante jours surtout, pour laisser sa Vie gagner en nous.
Quarante jours de carême comme autrefois quarante ans dans le désert pour le peuple d’Israël.
Quarante jours, comme quarante ans pour recevoir une terre promise, un cœur nouveau, ni dur ni mou, mais un cœur tendre, ajusté à la tendresse du Père, un cœur vivant, quoi.
Quarante jours avec quelques propositions que fait I’Eglise.
Quarante jours de jeûne qui n’ont rien d’un programme minceur pour perdre quelques rondeurs, mais pour y gagner en légèreté et prendre un peu de hauteur.

Quarante jours pour nous délester de ce qui nous encombre la vie, de ce qui nous cloue au sol et nous fait vivre comme les poules, le bec toujours en train de picorer.
Quarante jours de partage, pour sortir de nos petites étroitesses, nous dé-ratatiner, sortir de nos rétrécissements, de nos recroquevillements ; quarante jours pour dérouiller nos doigts crispés sur des petites richesses de tous ordres, pour déployer nos mains et y gagner en amplitude. Il y a plus grand que l’homme en l’homme !
Quarante jours de prière : pas pour escalader le paradis, mais y gagner en profondeur, laisser le paradis s’inscrire en nous et devenir ce que nous sommes : des fils d’un même Père. Et ne l’oublions pas, des frères.
Quarante jours de joie. Que le soleil des premiers jours de printemps s’inscrive sur nos visages et dans nos cœurs.
Durant ces quarante jours, nous ne ferons pas semblant que Jésus va mourir et qu’il va ressusciter : Il est vivant, c’est notre foi, notre espérance. Pendant ces quarante jours, nous reprenons la route vers lui. Et lui va nous donner aux autres…
Pensons carême : carrément bien ! Carême en bien !
Raphaël Buyse, La cendre avant le feu, Médiaspaul 2018